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Zoom sur l'Intelligence Artificielle et ses perspectives en Afrique
Opportunités, Défis et Réussites

Rédigée par : Mohamed Diabaté, Soukayna Kebiri, Kinane Lachelah, Ikbal Mohamed, Mohamed Wilane
Chères Lectrices, chers Lecteurs,
Nous vous proposons pour cette nouvelle Newsletter une revue sur l’intelligence artificielle (IA) en Afrique. Traiter ce sujet nous paraît important au vu de toutes les opportunités que pourraient permettre les technologies qui lui sont associées, en particulier sur un continent toujours en développement.
En ce sens, il serait intéressant d’étudier les axes suivants :
Comprendre l’ampleur des ambitions africaines au sujet de l’IA
Comprendre l’importance de la numérisation et de la connectivité pour le développement de l’IA sur le continent
Identifier les secteurs d’activité clés qui pourraient connaître d’importants développements grâce à l’IA
Identifier les réussites de l’IA en Afrique
I. L’IA : ambitions de l’Afrique
L'Afrique affiche des ambitions grandissantes dans le domaine de l'IA, avec un intérêt croissant pour l'exploration et l'exploitation de cette technologie. Un exemple révélateur de cet engouement est l'inauguration récente du Centre africain de recherche sur l'Intelligence artificielle (ARCAI) au Congo. L'ARCAI a pour mission de favoriser la formation en IA, de stimuler la création d'emplois et de soutenir la croissance économique en Afrique, mettant l'accent sur la recherche, la formation et la mise en place de programmes de maîtrise en IA.
Cependant, l'adoption de l'IA par les entreprises africaines reste limitée. Plusieurs obstacles entravent son expansion. Premièrement, de nombreux pays africains sont aux prises avec des défis liés à l'infrastructure de base et à l'accès à Internet, deux éléments essentiels à la mise en place d'applications d'IA. Ces obstacles entravent la diffusion de cette technologie dans des domaines tels que la santé, l'agriculture et l'éducation. Un autre défi majeur réside dans la pénurie de professionnels qualifiés en IA sur le continent. La formation d'experts en IA est cruciale pour le développement et la mise en œuvre de ses solutions, mais les programmes de formation et d'éducation en IA sont encore insuffisamment développés à l’échelle du continent.
Pour surmonter ces obstacles, il est tout de même encourageant de noter que des initiatives telles que l'Alliance Smart Africa et la création de programmes d'enseignement en IA se développent. De plus, certains pays, comme le Bénin, se sont fixé des objectifs ambitieux pour devenir des acteurs majeurs de l'IA dans un avenir proche. Le Bénin, par exemple, se concentre sur l'exploitation de ses données massives et développe des initiatives telles que la détection de tumeurs cérébrales à l'aide de l'IA et l'introduction de robots policiers pour réguler la circulation routière. L'éducation en robotique est activement encouragée, avec des étudiants qui ont déjà remporté des compétitions internationales.
II. La numérisation et la connectivité comme défi principal sur le continent
Le déploiement de processus de numérisation et d’accroissement de la connectivité constitue un des défis majeurs que doit relever l’Afrique. Bien qu’il y ait déjà sur le continent une émergence progressive de l’IA avec l’existence d’acteurs sérieux en la matière, il existe tout de même des disparités assez marquées entre pays, ce qui crée une disruption de cohérence dans le projet de mouvance générale de l’Afrique vers l’IA. L’Afrique du Sud, par exemple, apparaît comme un moteur de l’IA sur le continent, avec environ 726 entreprises spécialisées en IA sur le continent, contre seulement 23 entreprises opérant en la matière au Sénégal. Plus généralement, il est à noter un retard de l’Afrique Subsaharienne en matière d’IA, qui affiche un indice IA régional de 29,38 (le plus bas à l’échelle mondiale), tandis que l’Afrique du Nord s’en sort mieux, avec un score de 38,59. Toutefois, les deux scores restent inférieurs à la moyenne mondiale, qui est de 44,61.
Ces données, qui ne paraissent pas, pour l’heure, des plus probantes, ne doivent pas occulter les potentialités de développement de l’IA en Afrique. En effet, selon certaines estimations, la contribution financière potentielle de l’IA au PIB Africain devrait représenter 1,2 milliards de dollars en 2030. De plus, le continent compte tout de même 2 400 entreprises spécialisées en AI, une bonne partie d’entre elles étant des start-ups (41%). De même, comme évoqué précédemment, la présence d’acteurs sérieux en la matière ne saurait être omise, avec des pays africains affichant de bonnes potentialités pour être des moteurs de l’IA africaine.
À cet égard, le Kenya se présente comme un candidat intéressant.. En effet, le pays affiche un certain avancement technologique au sein du continent. On y observe la présence de 204 startups spécialisées dans l’IA, ce qui en fait le 4ème pays africains en termes de nombre de startups IA, notamment dans les domaines de la fintech et de l’agritech. Le gouvernement kenyan a également mis en place des incitations fiscales pour encourager les entreprises à se lancer dans l’IA.
Il est également possible de citer le Nigéria, plus gros contributeur au PIB continental africain, qui, au-delà même de son dynamisme porté par l’économie pétrolière, tente de diversifier ses domaines d’expertise en investissant notamment le champ de l’IA. On note ainsi l’établissement d’une stratégie nationale d’IA, par la mise en place d’un consortium composé des meilleurs experts mondiaux d’origine nigériane sur le sujet, afin de réfléchir sur la manière dont l’IA pourrait répondre aux défis de croissance et de développement du pays.
Enfin, le cas du Maroc s’avère aussi édifiant quant à la prise de conscience de l’importance de l’IA en Afrique. Ainsi, le centre international d’IA du Maroc, Ai Movement, est un centre d’excellence en IA qui a pour vocation de favoriser l’émergence d’un savoir-faire marocain en Intelligence Artificielle et en Sciences des Données. Il comprend à la fois des instances de formation et un centre de recherche. La finalité de cette démarche est d’anticiper et accompagner les évolutions et les transformations relatives à l’IA et aux Sciences des Données dans le but d’apporter des solutions innovantes, opérationnelles, résilientes et éthiques aux problématiques nationales de société, d’environnement, de marché, d’économie et de technologie.
III. Opportunités : Les secteurs clés
Les opportunités permises par l’IA en Afrique sont nombreuses, et ce dans différents secteurs. En effet, on repère la plupart de ces opportunités dans les secteurs de l’agriculture, de l’énergie et de la santé.
En ce qui concerne le secteur de l’agriculture, l’enjeu est d’une grande envergure. Ce secteur qui représente environ 54% de l’emploi en Afrique subsaharienne, et plus de 70% dans certains pays de la région, revêt un rôle absolument moteur dans les économies du continent. Il va de pair que l’implantation de certaines technologies liées à l’IA pourraient être déterminantes dans l’évolution de l’agriculture en Afrique. En permettant notamment l’analyse de données agricoles à grande échelle, l’anticipation de phénomènes météorologiques ou encore l’optimisation des récoltes, l’IA promet un avenir radieux à l’agriculture africaine. La marge de manœuvre pour améliorer les rendements sans détériorer les terres est parfois très réduite, l’IA pourrait donc permettre à travers des processus d’optimisation, d’exploiter cette marge de manœuvre.
Pour l’énergie, le rôle de l’IA est également déterminant. Avec plus de 630 millions d’individus vivant sans source fiable d’électricité, l’Afrique souffre d’un important manque d’accès à cette forme d’énergie aux enjeux immenses dans un contexte de transition du secteur pour la protection de l’environnement. Dans certains pays comme le Nigéria ou l’Afrique du Sud, le manque d’efficience dans le sujet des réseaux électriques a un impact significatif sur la croissance économique. Le premier enjeu de taille pour l’IA serait d’optimiser la façon dont l’électricité est distribuée à travers le continent. En effet, la mise en place de systèmes de distribution assistés par l’IA permettrait une meilleur allocation de l’électricité en fonction des besoins en temps réel de chaque région. Un second enjeu serait d’utiliser l’IA pour l’optimisation de la conception des fermes solaires de sorte que celles-ci puissent générer le plus d’énergie possible tout en limitant au maximum les coûts.
Enfin, en ce qui concerne le secteur de la santé, l’IA pourrait également revêtir un rôle déterminant dans le développement du continent. Il existe un important lien entre l’amélioration de l’accès à la santé d’un pays et son développement, notamment à travers une hausse de la productivité permise par une population en bonne santé. En cela, il est nécessaire pour des nations en développement de proposer à leur population un accès de qualité aux différents soins nécessités. L’IA pourrait ici intervenir à travers la conception de systèmes de machine learning permettant des diagnostics médicaux à distance grâce à des applications accessibles via smartphone. Ces évolutions pourraient être précieuses, en particulier pour les populations vivant dans des régions isolées. Des évolutions sont nécessaires dans le développement de ces solutions et leur distribution sur l’ensemble des territoires concernés.
Rapport 2023 : Artificial Intelligence Revolution in Africa: Economic Opportunities and Legal Challenges
IV. Les réussites
Le développement de l'IA en Afrique n'est pas simplement une question de technologie, c'est aussi une opportunité d'affirmer la souveraineté numérique du continent et de créer des outils qui répondent aux besoins spécifiques de ses communautés. Le futur de l'IA en Afrique est à la fois prometteur et complexe, offrant une opportunité unique d'équilibrer les relations mondiales tout en respectant la richesse des cultures locales.
Cette évolution nécessite un équilibre entre l'adoption des technologies et la réflexion sur les conséquences sociales et culturelles. La technologie ne doit pas être perçue comme la réponse à tous les problèmes, mais comme un outil qui peut être utilisé pour le bien de l'humanité. Les initiatives visant à former la prochaine génération de professionnels de l'IA en Afrique, tout en mettant l'accent sur la diversité culturelle et la préservation des traditions, sont un pas important vers la création d'un avenir harmonieux, propice à l'innovation et au progrès.
Google a levé le voile sur un chapitre intéressant de l'innovation africaine en annonçant la première cohorte de son programme "Google for Start-ups Accelerator : AI First". Cette initiative réunit 11 start-ups déterminées à relever les défis africains et mondiaux grâce à l'IA. Selon McKinsey, l'IA devrait contribuer de manière significative, à hauteur de 1,3 milliards de dollars USD au PIB de l'Afrique d'ici 2030, créant ainsi une formidable opportunité de croissance pour le continent.
Les start-ups sélectionnées participeront à un programme d'accélération de 10 semaines comprenant des séances de mentorat, des conseils techniques, des opportunités de réseautage, ainsi que l'expertise en IA de Google. Ces start-ups proviennent de divers pays africains, y compris l'Afrique du Sud, le Ghana, le Kenya, le Nigeria, l'Éthiopie, le Sénégal et l'Ouganda.
Depuis 2017, Google soutient activement les entrepreneurs africains à travers divers programmes, avec un investissement total de 263 millions de dollars USD. Cela a permis de créer plus de 2 800 opportunités d'emploi. Le nouveau programme d'accélération renforce davantage l'engagement de Google à encourager l'innovation en Afrique grâce à l'IA.
L'IA est en train de transformer le paysage entrepreneurial africain, et grâce à ces start-ups innovantes, l'avenir s'annonce prometteur pour le continent.
